Sixième génération aux commandes d’un groupe industriel – Semin est spécialisé dans les produits de construction et notamment les enduits pour les joints de plaques de plâtre –, elle a pris en 2017 le rôle de DG après une première expérience dans le Bâtiment : « dans une entreprise tierce – je ne voulais pas entrer directement chez Semin, je tenais à faire mes armes ailleurs. »
Caroline souligne à plusieurs reprises le plaisir qu’elle ressent à travailler en famille. Elle décrit un père attentif qui ne tient guère à ce qu’elle prolonge ses cours de pilotage, mais aussi un BizDev dans l’âme, doué d’une excellente capacité d’anticipation. « Il m’avait dit : “Tu rejoins la boîte si tu en as envie – et si tu t’en sens capable.” Lui-même a failli ne pas y entrer, c’était le petit dernier de six enfants. Il avait entrepris des études de médecine, puis songé à l’architecture, avant d’être rattrapé par le destin familial. Il est arrivé là presque par accident et il a fait grandir Semin. Il a toujours eu des relations houleuses avec mon grand-père… Alors, nous sommes heureux, lui et moi, d’opérer le mouvement inverse. Nous nous entendons à merveille. »
Semin aujourd’hui, ce sont trois actionnaires : le père et ses deux filles. Il n’y a pas de figure maternelle sur cette scène-là. Alors, de quelle place Caroline dispose-t-elle pour se faire un prénom ? « Plus ça va, plus je prends conscience de l’ampleur de la tâche. C’est un gros bateau à manœuvrer, avec 12 sites, 200 000 tonnes de produits par an et des ventes dans 67 pays – 40 % de notre chiffre d’affaires. Je travaille surtout sur le développement commercial et la R&D. »
Depuis qu’elle est entrée au Comex, Caroline a vu doubler le nombre de collaborateurs. Semin a élargi ses gammes en montant des usines et en rachetant des fournisseurs. Il y a chez sa DG un curieux mélange de détermination et de souplesse. Celle qui a travaillé en restauration et qui a été hôtesse sur les plateaux TV, a trouvé une autre manière de jouer avec son image, de montrer que tout est possible. « Être viril, ça veut dire quoi ? C’est être fort. Stable. Fiable. Alors, ce n’est pas être masculin, ou féminin. »
Climat social, difficultés d’approvisionnement, enjeux écologiques… Caroline évoque son quotidien de « bosseuse » et reconnaît avoir du mal à lâcher prise. « J’apprends progressivement à accepter que tout ne soit pas parfait. » Elle se déclare « entrepreneuse », bien plus que dirigeante ou cheffe d’entreprise. « On ne parle pas assez des repreneurs. Entreprendre, ça veut dire oser, avoir envie, embarquer les équipes, être un moteur. Je ressens une vraie rage d’innover, de développer des produits qui n’existent pas et de marquer l’Histoire. On y travaille avec passion. »