Du coup, puisqu’il n’est pas encore impoli de savourer une promesse tenue, Nicolas Morschl en savoure une autre, toute personnelle celle-là, qui avait précédé, et que cent fois et une il s’était répétée : « Comme un dingue ! » Il résume ça d’un souffle, avant de s’expliquer d’un autre : « Au début, je faisais tout. » Mais quand il dit tout, on comprend que ce fut tout ! Jusqu’à faire lui-même les envois aux clients, le carton, l’étiquette, l’adresse, le petit mot qui fidélise pour accompagner la commande. Cette fois, il s’explique vraiment : « J’avais pris soin de sélectionner mes fournisseurs, mes futurs partenaires, de m’assurer pour chacun des produits d’une fabrication de qualité, et voilà que sans m’en apercevoir j’étais embarqué dans une sorte de spirale. Par exemple, je passais des heures à choisir la couleur du prochain drap qu’il y aurait à mettre en ligne, du bleu, mais quelle nuance de bleu ? à rayures, mais l’épaisseur de la rayure ? des heures ! » Comme si l’existence de l’entreprise était en jeu à chaque instant, que tout le projet dépendait de chaque geste, qu’une décision un peu de travers menaçait de flanquer tout à plat. L’impression que Nicolas Morschl garde de cette période, c’est d’emblée celle d’une solitude, mais d’une solitude créative, effervescente, quoiqu’il la dise un rien stéréotypée, genre type la nuit le jour dans son hangar à inventer, imaginer, créer, tout esseulé, qu’à cela ne tienne, pense-t-il, le rêve vaut bien de payer de sa personne ! Car il en est lucide à présent : « Je crois que j’ai eu besoin à ce moment-là de me faire mal ; qu’il me fallait en passer par là pour monter une boîte, me retrouver dans le dur, obligatoirement… Savoir faire un paquet !… Pas d’e-commerce sans paquet, et pas de paquet sans celle ou celui qui le confectionne, qui physiquement le remplit, le ferme, l’envoie… Il me fallait savoir faire un paquet ! »