Hugues Hansen, fondateur de Start’inPost – l’accélérateur d’innovation du groupe La Poste – est passé de l’autre côté du miroir en fondant sa propre start-up l’année dernière.
VanO, c’est une solution de mobilité partagée à destination des villes moyennes (20 à 80 000 habitants). Lorsque le confinement a débuté, Hugues s’apprêtait à lancer son MVP. L’opération a été reportée, puisqu’elle dépendait des résultats des municipales : les maires sont ses premiers prospects.
L’actualité a cueilli Hugues de plein fouet : il a réagi en entrepreneur aguerri, entre recul, analyse et réactivité.
Embrasser l’incertitude
Parmi ses activités en cours, Hugues fait toujours du coaching (pour start-uppers, ETI et grands groupes) et ça se sent : il a les pieds sur terre, il applique à sa propre entreprise les recettes qu’il prescrit aux autres. C’est donc avec objectivité qu’il a passé la crise actuelle au tamis de VanO : d’abord, le second tour des municipales, décalé de mars à la fin du mois de juin, a bousculé ses plans. « J’avais prévu un démarrage en avril, parce qu’aucun maire ne pouvait prendre de décision avant d’être certain d’être (ré)élu. Bon. Du jour au lendemain, il a fallu revoir ce planning, sans aucune visibilité sur l’avenir. »
Les bouleversements de société viennent interroger son modèle
Mais surtout, les bouleversements de société liés à la pandémie et au passage massif au télétravail viennent interroger son modèle : si les transports domicile-travail se réduisent, c’est son marché qui diminue automatiquement. En revanche, le volet écologique de son offre peut trouver un nouvel écho dans le « monde d’après ». Même chose pour l’impact sociétal : VanO permet aux travailleurs éloignés de leur lieu de travail de s’y rendre à toute heure. Ceux qui continueront à bouger- et parfois de plus en plus loin – restent une cible privilégiée.
S’en tenir aux chiffres comme mode de décision
Alors, Hugues s’en tient aux chiffres : « C’est mon mode de décision par défaut. Dans ma carrière, j’ai pu voir souvent que c’était le critère le plus juste, plutôt que de se fier aux intuitions des uns et des autres, ou au nombre de galons des décideurs. »
« Une start-up qui se lance, c’est une start-up qui vend. C’est tout. »
Il a gagné un concours d’innovation – aux Mureaux – et convaincu un investisseur, Leonard (groupe Vinci). Mais, de la même façon, il relativise ces succès : « Une start-up qui se lance, c’est une start-up qui vend. C’est tout. Rien ne remplace de vrais clients. Mon associé a un profil métier, moi j’ai la casquette innovation et financement. A nous deux, nous sommes complémentaires. Nous avons, aussi, peu de frais de structure. Nous pouvons tenir un moment, ce qui allège notre charge mentale. »
L’importance de l’impact sociétal de la start up
VanO est le troisième projet entrepreneurial dans la vie de Hugues. « J’ai toujours choisi mes sujets en fonction de leur impact sociétal. L’emploi reste une constante : après avoir lancé un site de dépôt d’offres d’emploi, puis une plateforme de jobs dédiés aux non diplômés (embauche.com), VanO rapproche ses utilisateurs de l’emploi, en supprimant l’un des freins : comment vais-je de ma banlieue jusqu’à mon lieu de travail situé dans une zone plus attractive ? La moitié des Français travaillent en horaires décalés. »
Retarder les licenciements c’est mettre l’ensemble de l’entreprise en péril
Après la crise de 2008, Hugues a été contraint de licencier son équipe et de redevenir salarié. « Ce genre de décisions, il faut les prendre au plus tôt sinon c’est l’entreprise elle-même qu’on met en péril. Là encore, ce sont les chiffres qui parlent. J’ai accompagné beaucoup de start-up qui ne sortent pas assez vite leur MVP, qui n’ont rien de tangible à proposer, or il faut absolument un premier client pour avoir un feedback positif ou négatif qui permette de faire évoluer le produit. »
« Ceux qui n’étaient pas motivés à 120% par leur projet vont repasser en free-lance ou rechercher un boulot. «
« Cette crise est un vrai révélateur de motivation, ceux qui n’étaient pas motivés à 120% par leur projet vont repasser en free-lance ou rechercher un boulot. Moi, je suis toujours motivé. Et pour le coup, je n’ai pas encore l’impression d’avoir vraiment commencé. Mon MVP, c’est un véhicule qui tourne dans une ville moyenne de banlieue parisienne, pendant 4 mois. Il coûte 100 000 euros, je ne peux pas le financer seul. C’est un gros MVP, mais je pense que c’est le minimum qu’on puisse faire. »
« Il ne faut pas faire d’étude de marché quand on lance une start-up, il faut tester ! »
Il ne faut pas faire d’étude de marché quand on lance une start-up, conclut Hugues. « Il faut tester ! Si AirBnB avait demandé une étude de marché, ils auraient eu des résultats catastrophiques. » Dernier conseil : « Appuyez-vous sur les réseaux. Entre ma première entreprise et la troisième, c’est le principal changement. Les réseaux sociaux ont explosé. Ainsi que l’Open Data. Il y a là une mine d’or pour le BtoB. Aujourd’hui, développer son réseau, l’entretenir, c’est accessible à tout le monde – sous réserve d’être rigoureux, méthodique dans l’approche. »
Portrait réalisé en Juin 2020 et rédigé avec ♡ par Florence Boulenger.
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