Entreprise du secteur public, CNP Assurances est un acteur majeur du marché, avec ses 47 millions d’assurés dans le monde. Mais c’est aussi un investisseur important, qui soutient financièrement plusieurs startups françaises et européennes. Un positionnement multiple qui lui confère un regard pertinent sur la souveraineté numérique, porté ici par Stéphane Dedeyan, directeur général de CNP Assurances.
« Chez CNP Assurances, la question de la souveraineté informatique est historique et remonte à sa création », déclare Stéphane Dedeyan, directeur général CNP Assurances. En effet, la compagnie d’assurance détenue par La Banque Postale a été créée en 1959, quelques années avant le Plan Calcul du Général De Gaulle, dont la visée était de maintenir l’autonomie du pays en matière de technologie de l’information et de développer une informatique européenne.
Que reste-t-il de cette volonté aujourd’hui ? « Les crises successives, dont la pandémie et la guerre en Ukraine, nous rappellent que la souveraineté numérique est plus que jamais un enjeu majeur », affirme Stéphane Dedeyan. Et le DG de souligner qu’aux trois rôles de CNP Assurances - investisseur, opérateur de services et centre de compétences -, correspondent autant de leviers de développement d’une souveraineté numérique, énergétique et industrielle.
La souveraineté par l’investissement
« Les risques liés à la dépendance numérique existent bel et bien », confirme Stéphane Dedeyan. Perte de compétitivité, exposition aux cyber crimes, risques diplomatiques… « Tous ces risques sont sans doute encore insuffisamment identifiés… mais pourtant bien réels. Il faut donc s’en protéger », conclut sur ce point Stéphane Dedeyan.
L’un des moyens d’y parvenir est de soutenir les entreprises françaises et européennes du secteur numérique. Chaque année, CNP Assurances investit des millions d’euros auprès de startups françaises et européennes de la fintech, l’assurtech, l’e-santé ou encore les services BtoB, à travers sa structure OpenCNP.
« L’objectif est de maintenir un niveau de concurrence avec des solutions d’autres continents et de faire émerger des champions européens », souligne Stéphane Dedeyan. C’est ainsi qu’OpenCNP se retrouve à l’origine du succès français Alan, dans l’assurtech, et du développement de startups spécialisées dans la cyber-sécurité, comme YesWeHack, CybelAngel ou encore Tehtris.
Par ailleurs, en matière de solutions d’intelligence artificielle, CNP Assurances gagne en autonomie avec la création en interne d’un dataLab, diwise, qui aujourd’hui propose également ses services en externe. « Ce projet d’intrapreneuriat offre des services API-sés, notamment d’automatisation dans la reconnaissance et l’échange de documents essentiels à notre métier (RIB, déclarations, avis d’impôts, actes de décès…) Mais c’est aussi un moyen de développer et de retenir les compétences humaines nécessaires à la souveraineté numérique ! », affirme Stéphane Dedeyan.
Vers un cloud souverain
En tant qu’opérateur de services, CNP Assurances a des besoins, et représente un gros acheteur institutionnel pour de nombreuses PME. « Dans ce cadre, nous veillons à ne pas imposer de barrières bureaucratiques, que les petites entreprises ne peuvent pas surmonter par manque de moyens financiers et structurels », précise Stéphane Dedeyan. Contribuer au chiffre d’affaires de startups est aussi un moyen de les soutenir dans leur phase de croissance, période toujours critique pour elles.
Concernant ses besoins, CNP Assurances, qui opère en BtoBtoC, doit faire circuler de nombreuses données, rapidement, de façon sécurisée et dans le périmètre du RGPD. « Nous disposons d’un cloud privé et nos solutions sont hybrides. Mais nous cherchons à recourir à un cloud souverain, ou a minima, dans le cadre d’une solution hybride, à pouvoir isoler la partie contenant les données les plus sensibles », précise le directeur général.
Sur la route vers un cloud souverain, l’open source a tout son intérêt. « Nous nous y intéressons de près, car c’est clairement un levier pour gagner en indépendance vis-à-vis des Gafam », précise Stéphane Dedeyan. Problème : pour l’heure, l’open source reste concentré sur quelques aspects du numérique, et ne concerne en rien le Iaas…
Il reste donc du chemin à parcourir, mais CNP Assurances s’entoure pour se rapprocher de la souveraineté, notamment en étant membre de Gaia-X, et partenaire du Cyber Campus.
« Les crises successives, dont la pandémie et la guerre en Ukraine, nous rappellent que la souveraineté numérique est plus que jamais un enjeu majeur. »
Interview issu de l'étude : Concilier performance industrielle et souveraineté technologique, éditée par Instinct Collectif en partenariat avec Cleyrop.